D’après le cabinet IDC, nous créerons chaque seconde en 2018 pas moins de 50 000 Go de données à l’échelle de la planète. D’ici 2020, le volume de données ainsi créé durant l’année sera 10x supérieur à ce qu’il était en 2013. C’est dire l’explosion des données à laquelle nous assistons (et participons). Pour l’entreprise, ces données supplémentaires sont source d’opportunités, tant pour le développement de leur business que pour l’amélioration de leur fonctionnement. Malgré cela, nombre d’entre elles tardent à s’y intéresser et préfèrent laisser de côté leurs données, dispersées ou soigneusement rangées mais dans les 2 cas inutilisées. Alors que pourraient-elles faire de toutes ces informations, comment s’y prendre et quels sont les freins à lever au préalable ?
1- Des opportunités qui font l’unanimité
En multipliant au quotidien les interactions avec son écosystème, aussi bien interne qu’externe, l’entreprise a la possibilité d’apprendre à le connaître réellement en profondeur. A l’ère du tout digital, la majorité des échanges sont numérisés, que ce soit sous forme de documents électroniques, de mails, de chat, de transactions en ligne,… De cette manière, l’entreprise agrège, petit à petit et sans même le vouloir, une quantité phénoménale d’informations sur son environnement et ses acteurs. Qu’il s’agisse des interactions entre ses collaborateurs, des échanges avec ses partenaires ou encore du suivi de ses clients, tout est aujourd’hui traçable, archivable et donc exploitable par l’entreprise.
Ces précieuses données constituent désormais l’un des principaux « assets » (actifs) de l’entreprise. D’ailleurs ce sujet ne fait pas débat et il suffit de rappeler quelques exemples concrets de l’utilisation de ces données pour finir de s’en convaincre :
– sur le plan marketing, les données récoltées sur les prospects et clients de l’entreprise permettent d’en dresser le portrait (persona) d’une manière beaucoup plus fidèle et pointue que par le passé, en comprenant notamment qui ils sont vraiment, ce qu’ils recherchent, quels sont leurs habitudes de consommation, leurs comportements d’achat, etc. La segmentation de la cible comme la manière de l’adresser s’en trouvent alors grandement améliorées.
– dans le domaine commercial, l’information enregistrée lors des précédents achats permet de proposer à chaque client, au bon moment, des offres complémentaires correspondant à ses besoins ou centres d’intérêt afin de développer au maximum le cross-selling.
– au niveau des ressources humaines, ces données se révèlent extrêmement utiles dans des registres très variés comme la capacité à dénicher les meilleurs candidats sur le marché, à améliorer la prévention des risques au sein de l’entreprise ou même à développer la performance des collaborateurs.
– dans le cadre de la relation client, les informations recueillies sur le profil et le comportement de chaque individu ou organisme (B2C/B2B) permettent de personnaliser au maximum cette relation et d’offrir une expérience utilisateur totalement sur mesure à chacun de ses clients.
2- Une exploitation encore complexe mais plus insurmontable
Pour pouvoir profiter des magnifiques opportunités offertes par l’exploitation de ces données, il faut d’abord réussir à les maîtriser. La tâche est souvent ardue tant leur volume est en général important, leurs sources multiples, et leur nature variée.
Pour en extraire l’intelligence, 4 actions-clés sont à mener :
1- la collecte
L’enjeu est ici de récupérer les données au fil de l’eau afin de constituer progressivement une véritable banque d’information pour l’entreprise. Cela nécessite de capter ces informations idéalement à la source, de les qualifier pour mieux les manipuler ensuite, et enfin d’en organiser l’enregistrement, et tout cela, bien sûr, de la manière la plus automatisée possible.
Aidé le plus souvent d’une direction des systèmes d’information, chacun des métiers de l’entreprise est responsable d’effectuer cette collecte sur son périmètre afin d’alimenter la base globale de connaissance de l’entreprise.
2- le stockage
Les données ainsi collectées doivent alors être stockées et ce qui pourrait sembler simple de prime abord ne l’est pas forcément. De fait, non seulement ces informations forment rapidement un volume de données considérable auquel il va falloir faire face, mais en plus ces données sont souvent sensibles et réclament des conditions de stockage hautement sécurisées pour en garantir l’intégrité et la confidentialité.
Dans ce domaine, le développement des plateformes « cloud » (stockage mutualisé) apporte une réponse technique et financière satisfaisante dans la plupart des cas. En revanche, la question de la sécurité demeure avec des engagements certes forts mais qui portent seulement sur les moyens engagés et ne constituent pas une garantie de résultats.
3- la qualité
Les données c’est extra, mais que valent-elles vraiment si on ne peut en garantir la fiabilité ? Pas grand-chose. Aussi, l’une des priorités avant de pouvoir les exploiter est de s’assurer de leur qualité. Et sur ce point, c’est la phase de collecte qui est généralement la plus délicate. Chaque étape de cette collecte, depuis la source des données jusqu’à leur enregistrement en passant par leur qualification, doit rechercher en permanence une qualité maximale sans quoi le résultat sera inexploitable ou, pire, risquerait d’induire l’entreprise en erreur.
C’est à nouveau de la responsabilité de chaque métier de garantir la fiabilité des données récoltées sur leur périmètre. Quant à la règle d’or elle est très claire : dans ce cas plus que dans tout autre, il vaut mieux privilégier la qualité à la quantité !
4- l’analyse
Une fois collectées, stockées et validées, ces données n’ont plus qu’à être analysées pour livrer tout leur potentiel. Dans un langage propre au big data, c’est ce qu’on appelle « libérer l’intelligence de la donnée ». Phase critique naturellement car il serait dommage de s’être donné toute cette peine sans en tirer, au final, les bénéfices. Mais il est pour cela nécessaire de savoir précisément ce que l’on cherche à comprendre et de se doter des moyens (humains et techniques) suffisants pour effectuer correctement cette analyse.
Aidées par l’explosion de la puissance de calcul des ordinateurs, les solutions dédiées au traitement du big data, de la BI (business intelligence), de la data visualisation et plus récemment du machine learning se conjuguent pour compiler et faire parler ces données afin que l’entreprise puisse en tirer tous les enseignements. Le fait que ces données soient parfois « non structurées » (à l’exemple des verbatims) ne facilite pas leur analyse mais même dans ce cas, il existe aujourd’hui des solutions, embarquant généralement de l’intelligence artificielle, qui permettent d’extraire l’information sans avoir besoin de la retraiter manuellement.
3- Mais alors, qu’est-ce qui coince ?
Des opportunités majeures, une exploitation désormais possible, mais qu’attend donc l’entreprise pour en profiter ? C’est là que le bât blesse, cette véritable mine d’or est insuffisamment exploitée voire totalement ignorée dans la plupart des cas. C’est vraiment dommage car l’entreprise pourrait s’en servir pour améliorer ses produits et services, augmenter la satisfaction de ses clients comme la performance de ses collaborateurs, et y gagner un avantage concurrentiel certain.
Plusieurs raisons plus ou moins avouables semblent expliquer ce paradoxe :
Les données, pas touche c’est perso !
C’est le mythe du « Big Brother » : on va tout savoir sur moi et je n’aurai plus d’intimité ni de secret pour personne. D’après une récente étude publiée par EY, 70% des consommateurs sont ainsi réticents à partager leurs données personnelles avec les entreprises. Hantée par ce procès d’intention, l’entreprise se méfie du sujet au point de préférer parfois le garder sous silence.
Certes la crainte est légitime et la question se pose véritablement, mais est-ce en évitant le problème qu’on le résout ? C’est au contraire en s’attaquant au sujet et en y apportant des réponses équilibrées tant dans l’utilisation des données que dans le respect de leur confidentialité que l’entreprise, dans sa diversité, peut faire avancer les choses dans la bonne direction. Cela évitera en outre de laisser le champ libre à un petit groupe d’entreprises hégémoniques dont les intentions restent à prouver…
Les données, pour quoi faire ?
Lancer une démarche d’exploitation des données de l’entreprise nécessite de déterminer au préalable ce que l’on cherche à savoir et pour quel usage. Pour ce faire, l’entreprise doit se livrer à un petit exercice d’introspection et se regarder telle qu’elle est avec ses imprécisions, imperfections, et axes d’amélioration. Cette remise en question n’est pas toujours du goût de tous et certains préfèreraient sans doute ne pas se faire mal et « continuer comme avant », mais elle est indispensable pour reconsidérer l’utilisation de ces données qui aujourd’hui sommeillent. Sur ce point, il existe maintenant de nombreuses méthodes, comme par exemple les ateliers de co-construction ou de design thinking, qui facilitent le dialogue et permettent réellement de libérer la créativité.
Au-delà de l’objectif, il sera tout aussi important d’évaluer dès le départ le ROI (retour sur investissement) attendu de l’opération pour lui donner en interne un maximum de poids et de valeur. D’après l’étude EY, seuls 42% des entreprises ont pris la peine de mesurer ce ROI potentiel.
Les données, moi pas comprendre
Autre frein et non des moindres pour l’exploitation de ces données, le peu de ressources et le manque de compétences actuellement allouées au traitement des données dans l’entreprise. Comme le montre l’étude EY, seuls 24% des entreprises se sont dotées des moyens suffisants dans ce domaine en dédiant au moins 10 personnes à cette fonction.
Face à l’émergence du big data, de nouveaux métiers voient le jour tels que data scientist, data analyst, data miner, etc. Tous ces « data quelque chose » sont là pour accompagner l’entreprise dans sa montée en compétence et insuffler une dynamique autour de l’importance et l’utilisation de ces données. Selon les cas, l’entreprise peut décider d’acquérir ces compétences en formant certains de ses collaborateurs ou en en recrutant de nouveaux, ou préférer chercher ces profils à l’extérieur de l’entreprise en se faisant accompagner. Mais quel que soit son choix, l’entreprise aura intérêt à gagner progressivement en autonomie sur un sujet aussi stratégique pour son propre avenir 😉
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